La masculinité toxique ou le théorème du serpent qui se mort la queue

Bonjour à tous et bienvenue dans cette nouvelle rubrique dans laquelle je partagerai avec vous chaque mois certaines de mes expériences et les leçons de vie que j’y ai rattaché. Pour ce premier épisode, j’aborde avec vous la notion de « masculinité toxique ». Si je ne cherche ni à défendre, ni même à réellement débattre sur le sujet, je m’interroge néanmoins sur son origine dans la société.

Je vous souhaite une bonne lecture 😉


Qu’est-ce qu’un homme pour vous ?

« Beau, fort, ténebreux, intépride » : force est de parier que ces termes seraient les premiers à venir à votre esprit si je vous demandais de me définir votre vision de l’homme idéal. Et, c’est bien connu : la sensibilité, l’excentricité et l’ouverture d’esprit sont des traits qui n’ont rien à faire chez un homme. L’homme idéal; le vrai, ne pleure jamais et ne recule pas devant le danger. Amateur de football ou de sports à hautes sensations, il prend sa dose quotidienne de protéines entre deux séances à la salle.

Voilà comment m’a été décrit l’homme parfait depuis mon enfance en tout cas. Amoureux de littérature et d’idées en tous genres, il va sans dire que j’ai passé une grande partie de ma vie à être confus au sujet de ma masculinité. Non pas ma condition en tant qu’homo sapiens mâle ni même mon orientation sexuelle, mais bien ma masculinité.

D’un enfant enjoué à un homme perdu

À 5 ou 6 ans, certaines personnes de ma famille m’appelaient « pleureuse » ou « mathieuse » (notez l’utilisation du féminin ici, attestant une pointe de mysoginie), parce que j’osais libérer ma frustration par des pleurs que par des coups. Anodin et bon enfant, non? Sauf que non.

Alors plein d’idées et d’émotions à ce jeune âge, mais encore beaucoup trop petit pour les maîtriser, on m’a rapidement fait avaler la pillule de l’homme idéal. Un homme ne pleure pas, et surtout un homme n’a peur de rien. Ces maux ou défauts de la personnalité humaines ne peuvent être présent que chez les faibles, ou pire, les femmes. Voilà ce que j’ai appris d’un très jeune âge et ce qui, mine de rien, a eu un impact beaucoup plus important sur ma personnalité et mes expériences de vie que je ne l’aurais pensé.

Désormais, je ne pleure plus, ou plutôt: je ne sais plus pleurer. J’ai enfoui il y a très longtemps ma personnalité, mes goûts et mes émotions au profit d’une société que je n’ai pas choisie et aujourd’hui ça me pose problème. Je me retrouve avec un plein d’émotions que je n’ai jamais appris à gérer, sinon refouler. Je ne sais plus pleurer, je ne sais plus aimer et surtout je ne sais plus qui je suis.

Le seul problème, c’est que je suis loin d’être le seul.

J’ai grandi dans une société dont l’esprit n’est ouvert qu’en apparance,

Qui, sous couvert d’acceptance a au fond peur de la différence.

Une société dans laquelle à chaque humain son étiquette, sa fonction.

Et, gare à ceux qui dépassent les lignes et souhaitent l’évolution.

Ce n’est que maintenant, au fil de ces mots que je découvre qui je suis.

J’ai passé l’essentiel de ma vie à me trouver différent. Je suis sensible, créatif et attentionné. Mais, avec plus d’idées dans la tête que de muscles sur le corps, comment obtenir le respect ? Comment évoluer dans une société qui ne value un homme que par son taux de testostérone ?

Thug Life

‘The Hate U Give Little Infants Fucks Everybody’. C’est après avoir appris davantage sur cette expression popularisée par 2pac (par l’intermédiaire du livre THUG de Angie Thomas, que je vous conseille), que j’ai pu mettre à plat mes réflexions. Sur mon Île comme ailleurs, à mon époque comme à d’autres, l’éducation des enfants reste le problème. Nous éduquons et laissons grandir des hommes pour qu’ils soient forts et déterminés. Nous leur apprenons à être forts en toute situation et à ne pas pleurer ou montrer signe de faible au risque d’être tratié de mauviette, de poule mouillée ou de façon particulièrement sexiste, de fillette.

Et c’est justement parce que nous n’apprenons pas à nos enfants à gérer leurs émotions que nous nous retrouvons avec des hommes assoifés de sexe et incapble d’aimer ou d’autres en pleine crise identititaire. Nous sommes tous, à notre manière, à l’origine du problème dont nous nous plaignons, tel un serpent qui se mort la queue.


En espérant que vous avez apprécié ce premier partage de réflexion. À très bientôt sur Bokantajénès !