Métropole… implications et débats

Bonjour à tous !

Comme je l’ai déjà dit ici je suis une étudiante de 21 ans qui vit en Martinique et qui revient d’une première année d’étude « là-bas ». Mais je ne suis pas revenue seule ! Mon cursus scolaire fait que  j’ai ramené dans mes valises cinq bordelais (ou presque), deux guadeloupéens, et trois jamaïcains. Nous formons une classe pas du tout homogène de quatorze élèves (puis que nous sommes aussi trois martiniquaises). Autant vous dire que les débats, quiproquos et divergences culturelles rythment notre vie de classe. J’ai eu envie de vous parler d’un de ces fameux débats autour du mot « métropole » !

Petit point lexical

Le mot métropole (nom féminin), a plusieurs sens selon le domaine dans lequel on se place histoire, géographie, économie… mais tous ses sens renvoie à une idée : la domination. Voyons un peu ! Dans l’histoire grecque la métropole est la « cité-mère, considérée par rapport aux colonies qu’elle a fondé et qui dépendent d’elle ». (sources : CNRTL) Dans l’histoire romaine, la capitale désigne « la capitale administrative d’une province ». (sources : idem) En géographie politique, la métropole est « l’Etat ou le territoire d’un état, considéré par rapport à ses colonies (ou mandats ou protectorats) ou à ses territoire d’outre-mer ». (sources : idem)

So. Vous avez compris où je veux en venir ? En 2019, alors que la Martinique (ainsi que les autres territoires d’outre-mer) a cessé d’être une colonie depuis 1946. Dans notre langage de tous les jours nous parlons et donc agissons comme si c’était encore le cas. Et le plus grave c’est la banalité de ce terme employé 10 000 fois par jour (« France métropolitaine » par ci, « les métros » par là) mais qui est clairement et directement hérité de notre passé colonial.

Un véritable sujet de débat

L’hétérogénéité de ma classe est donc comme je le disais source de nombreux débats, et l’un des tout premiers était clairement celui là. -Et je passe le moment de gêne et de tension quand un jamaïcain a affirmé qu’Emmanuel Macron venait visiter sa colonie en parlant de nous (OUI DE NOUS MARTINIQUAIS).-

Dès Septembre, nous les antillaises avons commencé à reprendre nos camarades hexagonaux quand ils employaient le mot métropole (autant dire au moins un fois par jour) et ils nous ont avoué ne pas comprendre pourquoi. En effet c’est un mot plus qu’utilisé tant sur les documents officiels, que dans les médias et la vie de tous les jours. C’était d’ailleurs le principal argument. Certes, mais. Ils l’ont ensuite comparé à l’anglais « mainland » qui traduit la même idée mais qui est beaucoup plus géographique et moins connoté historiquement hein. Cependant cherchant à ménager notre susceptibilité ils faisaient de plus en plus attention au choix de leurs mots sans pour autant toujours comprendre en quoi cela était dérangeant.

Notre débat était lancé depuis plusieurs semaines quand un de nos profs (blanc et hexagonal) s’est insurgé un jour par « la légèreté » avec laquelle nous utilisions le mot en M. Il a alors appuyé nos arguments et insisté sur le fait qu’utiliser à tord et à travers le mot en M était un abus de langage mais que cela ne signifiait pas qu’il était correct de l’utiliser.

Lueur d’espoir lexical

Première victoire, dans ma classe plus personne n’utilise les mots « métros », « métropole » « métropolitaine »!! J’ai aussi remarqué que dans les médias locaux on entend davantage de synonymes tel que « France hexagonale/continentale », « l’Hexagone », « Le Continent », .. (si si je vous assure faites attention 🙂 ) et enfin depuis juillet 2018, un député martiniquais d’un certain parti de gauche a déposé un amendement afin de faire supprimer le mot métropole des textes et documents officiels.

Alors jénès ? Vos avis sur le sujet ? Pensez-vous avoir un langage conscient ? Ou parlez vous juste par habitude ? D’après vous est-ce une question qui vaille la peine d’être creusée ou bof ? Dans tous les cas pour ceux qui sont à court de synonymes, nous pouvons aussi faire comme les anciens qui désignent ce fameux continent par « là-bas ». Adverbe qui décrit parfaitement la distance, le froid et le changement culturel.

Pour finir je dirais que les débats qui ont animés ma classe ne se sont bien évidemment pas arrêtés là !  Et je peux déjà vous annoncer que ma prochaine chronique parlera d’un autre sujet qui a crée discussion, débat et incompréhension avec mes petits camarades. Et si vous n’avez pas peur des spoils, je vous invite à regarder ce super clip comme teaser de mon prochain sujet :

C’est drôle et ça reste dans la tête !